BELESTA-EN-LAURAGAIS

Titulature : saint Jean-Baptiste

72 habitants en 1982

84 habitants en 1999

Occitan : « bel estar » qui signifie « bellement situé »

 

HISTORIQUE

 

Le village de Bélesta se situe dans les vallons du Lauragais à 8 Kms environ au sud-ouest de Saint-Félix, au carrefour des départementales D.54 et D.72.

 

C’est en 1271 qu’il en est fait mention pour la première fois, lors du rattachement du Comté de Toulouse à la couronne de France, à la mort d’Alphonse de Poitiers et sa femme Jeanne, fille de Raymond VII.

 

Mais, à quelques centaines de mètres du village, se trouve un lieu-dit « Roqueville ». Il est cité dès 1211 dans un épisode de la guerre des Albigeois. La tradition orale rapporte l’existence d’un petit peuplement et la présence d’un cimetière est attestée par la découverte d’ossements humains. En 1831, ce lieu-dit est marqué d’une croix. Malheureusement les archives, brûlées à la Révolution nous privent d’une partie de l’histoire du village.

       

A la vérité, Roqueville évoque l’emplacement d’un petit fief appartenant aux seigneurs des Cassès, de la mouvance des barons de Saint­Félix dès 1211. En 1247, c’est Bertrand de Roqueville qui est seigneur et en 1397, Jean de Roqueville se fera enterrer au monastère des Anges des Cassès. Ce monastère fut fondé par Marguerite de l’Isle Jourdain, épouse d’ Arnaud Duèze de Saint­Félix, neveu du pape Jean XXII. Dans un ancien compoix, on apprend que les Dames des Cassès possédaient des parcelles de terre à Bélesta.

 

Les Roqueville furent, en leur temps, des Cathares convaincus et leur habitat servit souvent de refuge aux hérétiques. Certains durent émigrer en Lombardie après la chute de Montségur en 1244, d’autres périrent sur les bûchers de l’Inquisition. Cependant leur nom est mentionné jusqu’au XVème siècle. En effet, en 1440, Brune de Roqueville, fille d’Algias de Roqueville, apporte  la seigneurie de Bélesta, en dot, à Gaillard III de Varaigne-Gardouch. Il devient le premier baron de Bélesta : la terre de Bélesta est qualifiée « baronie » dans le serment de fidélité prêté par Gaillard III au roi Louis XI dans la salle de Trésorerie de Toulouse (place du Salin) le 7 juin 1463.

 

En 1510, la seigneurie est démembrée du comté de Carmaing (Caraman) et entre dans celui du Lauragais. Gaillard V y exerce le droit de justice et bénéficie de tous les droits procurés par cette seigneurie. Lors de la réorganisation de la France en départements, en 1802, Bélesta devait rester paroisse de l’Aude, mais les consuls menèrent une action énergique pour être réunis à Toulouse. De plus, Mourvilles-Hautes convoitait Bélesta, mais les habitants refusèrent ce projet « pour opposition de sentiments » et souhaitaient un rattachement au Vaux, donc à l’archevêché de Toulouse.

 

 Les visites épiscopales des XVIIème et XVIIIème siècles donnent une description de l’église Saint-Jean Baptiste à cette époque.

Le 18 septembre 1645, l’évêque de Saint-Papoul signale dans son procès-verbal :

 

« une église champêtre bien bastie et blanchie »l'autel-mage* est garni de nappes grossières, de chandeliers, une pierre sacrée rompue un devant d'autel de damas, un tableau vieux La chapelle Notre-Dame qui est à l'est de l'évangile du grand autel n'y a été trouvé qu'une seule nappe qu'on dit et assuré que c'estait la chapelle que le Seigneur du lieu-dit tient estre pour sa sépulture.

A esté ordonné que les dits seigneur ou dame feront garnir le dit autel de nappes et autres choses requises dans un mois.

Aultrement la dit-chapelle sera prinse pour servir à l'usage de sacristie en faveur de la dite cure les fonds baptismalles sont au fonds de l'église sous une petite voûte ; comme à la visite précédente, l'eau est dans une armoire à côté de l'autel, ordonné qu'il sera faict une piscine et sera fermé d'une porte grille aux dépens des fruits-prenants ; la chapelle Saint Blaise est en bon état, entretenue par l'œuvre et la charité des habitants ».

 

Lorsque, le Ier mars 1700, Mgr BARTHÉLÉMY DE GRAMMONT, évêque et seigneur de Saint-Papoul, vient à son tour effectuer sa visite, il écrit dans son rapport de visite :

un tabernacle fort vétuste, ni dorure, ni peinture, et la chapelle du seigneur qui répond au presbytère est en bon état, mais la pierre sacrée est trop petite ;

 

il y a interdiction d'y célébrer la messe en attendant une pierre sacrée convenable.

 

En 1778, la seigneurie de Bélesta comprend la haute, moyenne et basse justice et le droit de sépulture dans le chœur de l'église paroissiale, entre le grand autel et l'autel Notre-Dame qui dépendent de la chapelle seigneuriale.

A la Révolution, en 1789, l'église est fermée ; mais réouverte en 1802, elle est intégrée au diocèse de Toulouse.

 

Au milieu du XIXe siècle, l'édifice menace ruine. Un projet de reconstruction et d'agrandissement est demandé à Jacques Jean ESQUIÉ, architecte du département :

La hauteur des murs intérieurs n'étant que de 3,5 mètres, il s'agissait de rehausser de 3,7 mètres pour une largeur de 5,5 mètres.

La couverture devait être en charpente imitant la voûte d'ogives de type Philibert DELORME.

De fait, c'est une voûte d'ogives en briques, recouverte de plâtre qui est posée et l'édifice est contrebuté de contreforts saillants à larmier. Une abside à trois pans est ajoutée.

 

D'autres projets d'aménagement du chœur et de deux sacristies, d'agrandissement de la nef de deux travées, furent ajournés faute de ressources.

Cependant, ESQUIÉ réalisa la façade en pierre de taille, ornée d'un triplet* et dominée par un clocher-mur en brique. Le reste de l'édifice est en grès du pays et en moellons de pierre, crépis.

L'ensemble des travaux fut réalisé de 1857 à 1861. L'inscription gravée au linteau du portail est sans doute de 1861. On peut y lire :

 

« M. le marquis CAMPAIGNO, maire, CLAVÉ, curé, M. ESQUIÉ, architecte du département ».

 

L'année suivante, une contribution du département et la participation de chaque habitant, en nature ou en espèces, permirent de construire à neuf une sacristie-chapelle, et de restaurer une autre chapelle.

Mais, un impôt extraordinaire fut levé pour solder les travaux. Cette même année, les vitraux furent placés ; de même le grand tableau du sanctuaire fut redoré, ainsi que le tabernacle.

Une aide de la mairie permit d'acquérir de nouveaux objets de culte.

 

En 1866, madame DE PANEBEUF, châtelaine de Bélesta, demande et reçoit l'autorisation de construire une seconde chapelle attenante à celle bâtie par son ancêtre au niveau du sanctuaire.

 

Le 20 octobre 1895, il est décidé la reconstruction du clocher endommagé par la foudre. Le travail fut exécuté par F. FOURNIER de Villefranche pour la somme de 1800 francs, à laquelle sont ajoutés des dons de particuliers pour 2000 francs.

La date de 1896 gravée sur le fronton triangulaire du clocher-mur indique la fin des travaux.

Dans l'inventaire des « Biens de l'Etat, des départements et communes », dont la fabrique* n'a que la jouissance, il est noté le 9 mars 1906, que l'église possède :

•      quatre pierres sacrées

•      trois tableaux dont un pour le maître-autel représentant le Christ en croix, et deux dans les chapelles du chœur

•      trois vitraux dans le chœur : saint Thomas, saint Jean ­Baptiste et saint jean

•      deux autres vitraux en grisaille

•      un tableau de l'Assomption dans la chapelle des morts

•      des fonts baptismaux en plâtre

•      un maître-autel de marbre

•      un autel de bois dans la chapelle du Sacré-Cœur

•      un autel de marbre dans la chapelle Notre-Dame

 

Une dernière restauration fut entreprise à la suite de l'effondrement d'une partie de la voûte en 1980. La commune de Bélesta prit en charge les travaux d'assainissement pour la somme de 350 000 francs, aidée par    une subvention du Conseil général.

Il s'agissait de drainer l'humidité qui détériorait l'édifice et de refaire la toiture.

 Les menuiseries, plâtres et peintures ont été repris avec les conseils de M. J. VILLEMUR, architecte à Toulouse. Les cinq vitraux du chœur sont l'œuvre du frère DENIS, moine à En-Calcat.

Une cloche, ainsi qu'un bénitier, transformé en baptistère, furent achetés, en 1988, à la commune voisine du Vaux, par M. SICARD, maire de Bélesta.

Le 4 mars 1989, avait lieu l'inauguration de l'église en présence des autorités civiles et religieuses.

 

DESCRIPTION

 

EXTERIEUR

 

L’église Saint-Jean-Baptiste est située au centre du petit village de Bélesta. Elle n'est pas orientée. En effet, le porche est tourné vers le sud-est.

Il s'agit d'un édifice rectangulaire dont le chevet est à trois pans. La porte d'accès du seigneur a été obturée.

Au nord et au sud, sur les murs goutteraux, on remarque la trace de l'agrandissement de l'église au XIXe siècle.

Les six contreforts qui renforcent chaque mur ne s'élèvent qu'à partir de l'exhaussement. Six fenêtres en plein cintre* ont été ouvertes entre les contreforts.

 

INTERIEUR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Les chapelles et les sacristies sont bâties en appentis au niveau des trois derniers contreforts.

 Leurs fenêtres de forme carrée, en lancette* et en plein cintre*, ouvertes à des hauteurs différentes sont la preuve de remaniements divers. La façade est toute de pierre.

Elle est de facture néo-romane, avec une large archivolte moulurée en plein cintre* qui retombe sur une corniche, laquelle repose de part et d'autre sur une colonne cylindrique.

Le tympan n'est pas orné. Il s'appuie sur un linteau monolithe sur coussinet. On peut y lire l'inscription de 1861.

Deux contreforts à ressauts renforcent cette façade, laquelle se termine par un fronton triangulaire que décore une petite arcature aveugle. Au-dessous, se trouve le triplet* voulu par Esquié.

Le clocher-mur est à trois baies et construit en brique :

 

• au premier niveau, deux ouvertures plein cintre* sont ornées de briques posées de champ autour d'un claveau central de pierre.

A chaque extrémité se trouve une croix de pierre sur un socle

• au deuxième niveau, beaucoup plus étroit, la troisième baie est occupée par la seule cloche

• une rangée d'arcatures aveugles décore chaque niveau. Le fronton triangulaire qui couronne l'édifice porte la date de 1896. Il est surmonté d'une croix de fer forgé portant une jolie girouette.

 

On pénètre dans l'église par une porte située au fond de l'église et ouverte dans le mur nord.

 

 

 

L’église présente une nef unique organisée sur cinq travées rythmées par des pilastres portant de simples doubleaux*. L'ensemble est couvert de fausses voûtes d'arêtes nervurées et ornées de clefs de voûte décorées de rosaces.

A la dernière restauration, les voûtes ont été peintes en bleu, les nervures de couleur brique. Le long des murs, un lambris a été posé ; la chaire stuquée et peinte a été laissée en place.

La première travée correspond à la tribune qui repose sur deux piliers circulaires. Deux anciennes ouvertures en plein cintre* ont été obturées.

De part et d'autre de la nef, éclairée de chaque côté par cinq fenêtres aux vitraux modernes, deux grandes arcades en plein cintre* donnent accès aux chapelles :

•  au côté nord, la chapelle Notre-Dame-de-la-Salette, dont la statue surmonte l'autel de marbre

•  au côté sud, la chapelle du Sacré-Cœur.

Le chœur est précédé d'une travée.

 Il est semi-circulaire, à cinq pans. L'autel et le tabernacle sont en marbre polychrome.

Au centre du chevet, un tableau monumental du peintre ROUSTIT de Revel représente le Christ en croix et sainte Madeleine à ses pieds.

Cinq fenêtres plein cintre* éclairent le chœur.

Une chapelle s'ouvre au nord dans le chœur. Il s'agit de l'ancienne chapelle des seigneurs. Elle est voûtée de pierre sur croisée d'ogives* qui retombent sur des colonnes circulaires. Les culots de retombée représentent les visages du Christ, de la Vierge et d'une femme.

De l'autre côté, au sud, la chapelle-sacristie a été transformée en sacristie et a perdu sa fonction de chapelle.

 

A l’extérieur, devant l’église, se trouve une grande croix de fer forgé du XVIII ème siècle, fixée sur un socle de pierre.

C’est près de l’église que sont regroupées la plupart des habitations et quelques fermes sont disposées aux alentours.

A l’Est, un peu à l’écart, se situe le château. Il a donc appartenu à la famille de Roqueville jusqu’au XVème siècle puis à Gaillard III  de Varaigne de Gardouch, qui devient baron de Bélesta.

En 1553, il est décrit château à trois tours avec leurs girouettes, dépendances et pigeonnier à quatre piliers, le tout clos de murailles que les habitants étaient tenus en temps de guerre de garder nuit et jour. Les biens nobles comprenaient environ cent arpents de terre, au milieu desquels se trouvait la métairie noble de Roqueville.

 

Le château, fort remanié avec les fonds procurés par le pastel, fut endommagé lors des guerres de Religion. En 1585, Jean de Varaigne, grand invalide de guerre y fut assassiné par les Religionnaires.

 

A la Révolution, le Château fut vendu comme Bien National : il était en partie détruit, et il ne restait que trois tours à moitié démolies.

 

Au XIXème  siècle, on retrouve le nom du marquis de CAMPAIGNO et, en 1866, Madame de PANEBEUF est châtelaine de BELESTA.

 

Aujourd’hui, remis en état, le Château est habité. C’est une bâtisse quadrangulaire de grès et de calcaire  gris. Il a retrouvé ses trois tours rondes et une partie date encore des XVème et XVIème siècles.

 

 Aux alentours de BELESTA, se trouvent d’importantes carrières de surface des gravières qui sont exploitées. Certaines ont été transformées en station de compostage.

 

Si on ne trouve aucun commerce, ce petit village peut surtout s’enorgueillir de posséder un observatoire construit par des astronomes amateurs qui l’animent et accueillent le public. On peut observer le ciel à l’aide d’un télescope de 80cms de diamètre les jours sans lune, car le ciel de Bélesta n’est guère pollué par l’éclairage nocturne.

 

La municipalité de Bélesta continue de veiller sur son patrimoine religieux : l’église, très bien entretenue, bénéficie d’un système de chauffage efficace, récent. Et surtout, comme Brigitte CORDEIL, secrétaire de mairie, l’écrit, si joliment, en décembre 2003 :

 «  Après s’être tu de nombreuses années, le clocher de Bélesta résonne à nouveau, midi et  soir,

préservant les matins encore endormis de ses habitants, ranimant l’église et son village comme on souffle avec ses joues sur la flamme du foyer afin qu’il ne s’éteigne pas » : c’est André MAFFRE, retraité de l’Education Nationale qui a repris l’ancienne mission de carillonneur, ajoutant ce qu’il manquait de poésie (avec l’autorisation de l’auteur.)

 

BIBLIOGRAPHIE

 

ACAS, documents non numérotés.

ADA, G 421.

ADA, Série B T1 - Sénéchaussée du Lauragais.

ADHG, V29.

AM Bélesta, non numérotées.  

BM Castres, 2K 151.

BEDOS  (O) Gaillard III de Varagne-Gardouch, baron de Bélesta – non publié

BIAU (abbé J.) Les clarisses du monastère Notre-Dame des Anges. Plaquette éditée par la M.J.C. de l’Aude – conférence du 22-2-03 - 262 pages

CAZES (J.P.) Le fort ou Castel Vielh in Habitat et Occupation des sols en Lauragais Audois au Moyen-âge – Thèse de doctorat 4 tomes 1018 pages

CORDEIL (B) in Le canton de l’Autan n° 18 décembre 2003 page 3

ESPENON (P.) Le canton de Revel sous la Révolution

FOUCAUD (O.) Jacques-Jean ESQUIE (1817- 84), architecte de Toulouse, Toulouse le Mirail, thèse de doctorat mars 1989 (déposée à la B.U. 333-389)

 La Croix du Midi du 19 mars 1989

MALARY (S.) Le Canton de Revel en Lauragais de l'Antiquité à la fin du Moyen-âge

RAMIERE de FORTANIER (J.) « Les droits seigneuriaux dans le Lauragais »page 136 et suivantes

 

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