Société d’ Histoire de Revel Saint-Ferréol                                      LES CAHIERS DE L’ HISTOIRE - N°14 - Année 2009

 

 

HÉRÉSIE ET INQUISITION DANS LA SEIGNEURIE

DE MONTGEY ROQUEFORT AU XIIIe SIÈCLE

par  Pierre BOUYSSOU

Mainteneur des Jeux Floraux

Edité dans la Revue du Tarn numéro 205 – printemps 2007 – pages 5 - 34


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A Jean Duvernoy et Michel Roquebert: leurs recherches, leurs travaux, leurs conseils, leur amitié ont permis cette étude.

 

Au commencement était Roquefort... Au Xe siècle et, sans doute avant, Roquefort est un village fortifié, un castrum, édifié sur une croupe isolée de la Montagne Noire.
De là, les pentes de la montagne dégringolent à la fois vers le sud, le Lauragais audois, le Carcasses, jusqu'à la plaine de Castelnaudary; et, vers l'ouest, l'autre Lauragais, au-delà de la plaine où s'édifiera bien plus tard Revel, à travers un moutonnement de collines, dont la première est celle de Montgey.

 



 
Roquefort  vue par Terson de Palleville (vers 1850)


   

 

 

 

 

 

 Selon Michel Roquebert, vers l'an 1000, et sans doute avant, quatre châteaux, quatre seigneuries se partageaient le contrôle de la Montagne Noire: au sud, Cabaret, d'abord, avec ses trois châteaux, puis Saissac; à l'ouest, Roquefort; au nord, Hautpoul.

     Dans le premier tiers du mythique an 1000, nous trouvons la trace des Roquefort.
Le premier portrait pourrait être un Uge Escaffre, apparu dans une charte de 1025. Simple hypothèse, mais confortée par la permanence de ce prénom peu courant dans la descendance des Roquefort et seulement dans cette famille.
Il était en ce cas l'époux d'une dame Goulayne et le père d'un Bernard, incontestablement seigneur de Roquefort en 1030. Ce dernier prénom se retrouvera également dans la lignée des Roquefort avec les prénoms d'Aymeric, Jourdain, Isarn, Pierre (Cf. tableau généalogique, en fin d'article).
L'Histoire Générale du Languedoc, qui doit tant aux copistes de Doat, nous permet de suivre l'évolution de cette famille poussant ses pions de la Montagne Noire vers le sud, ferraillant contre ses cousins, n'hésitant pas à s'opposer aux Trencavel, au besoin les armes à la main, puis sachant, la paix faite, leur rester fidèle.

     Autant nous pouvons suivre, de chartes en arbitrages jusqu'aux portes du XIIIe siècle, leurs efforts vers le sud, autant nous sommes dépourvus de toute information sur leur implantation à l'ouest. Uniquement seigneurs de Roquefort jusqu'à la fin du XlIe siècle, nous les découvrons au siècle suivant portant également le titre de seigneurs de Montgey.
Roquefort, certes, n'est pas abandonné, nous le verrons, mais le pouvoir est dans la plaine. Le théâtre de nos observations courra ainsi constamment de Roquefort vers Montgey, en passant par les fiefs intermédiaires autour de Soréze, avec Dreuilhe, Durfort, Cahuzac, Vauré, Las Touzeilles qui sera intégré au milieu du siècle dans Palleville fondé par Aymeric de Roquefort, enfin Gandels, Garrevaques, Auvezines qui est déjà Montgey.

C'est de la montagne à une haute colline que va s'exercer le pouvoir des Roquefort à l' ouest.
Voilà planté, sinon le décor, du moins le support de la scène sur laquelle nous allons voir évoluer ces acteurs de l'hérésie. Hérésie: quelle hérésie ?

                                                                     

     Il est admis que l'hérésie dénommée à l'origine albigeoise, et maintenant cathare, dont les éléments doctrinaux sont trop connus pour qu'il soit utile de les énoncer, n'est qu'une manifestation nouvelle de dissidences religieuses lointaines. Son succès s'explique aisément. Ses fidèles la présentent, non comme une rupture, mais comme un approfondissement de la doctrine évangélique. Ils se proclament bons chrétiens. Ils donnent l'exemple de la pauvreté. L'enseignement de base se réduit à quelques simples principes, accessibles à tous.
L'hérésie s'établit en force au cours du XIIe siècle dans cette partie du Languedoc, d'Albi à Foix, de Toulouse à Béziers, sans doute pour des motifs tenant bien moins à la religion qu'à la géopolitique.
Le comte de Toulouse, en dehors de ses domaines directs du Toulousain, n'exerce qu'une autorité théorique sur son comté dont les possessions vont jusqu'en Provence, mais sans vraie continuité géographique.
Il est en lutte presque constante avec le roi d'Aragon qui cherche à développer son implantation dans cette région, et avec ses grands vassaux, les comtes de Foix ou les vicomtes de Béziers-Carcassonne.
Ces derniers s'appuient sur les seigneurs des castra de la Montagne Noire, du Lauragais audois, eux-mêmes soucieux d'autonomie, en fait, les véritables maîtres du pays, disputant pied à pied l'autorité des Trencavel.
Évêques ou abbés des grands monastères, souvent leurs parents, sont eux aussi soucieux de leur indépendance relative

SOMMAIRE

 

Les hErEtiques dans la seigneurie

 

Nous découvrons la seigneurie dans la mesure, finalement assez faible, où ses habitants ont été liés à l'hérésie et dans la mesure où les catégories sociales ont pu être répertoriées, aisément pour la noblesse et ses familiers, plus difficilement lorsque les témoins ne déclarent pas leur profession, aisément encore pour les parfaits.

 

La noblesse

 

Il s'agit ici avant tout de la famille seigneuriale, de ses apparentés, de la petite noblesse des chevaliers et de quelques porteurs de titres: « en » ou « na », contractions anciennes de dominus et domina.

Les Roquefort, seigneurs de Montgey et de Roquefort, dominent la scène à tous égards. Dans la seconde moitié du XIIe siècle, époque où l'hérésie est partout installée, le chef de famille est Aymeric de Roquefort.

Puissante stature d'un grand vassal de Trencavel, guerroyant à ses côtés contre le comte de Toulouse entre 1180 et 1190, lors de ce vrai conflit international qui oppose Trencavel, le comte de Foix, le roi d'Aragon, le roi d'Angleterre à son fils soutenu par le comte de Toulouse, Guillaume IV.

Mais Aymeric est aussi bien, à d'autres moments, témoin de Guillaume IV... Il a avec son épouse, fille sans doute des comtes de Termes (château des Corbières), huit enfants : six garçons, deux filles, tous acteurs à des degrés divers de cette aventure singulière qui va bouleverser durablement la société languedocienne.

 

 

genealogie

 

genealogie2

 

Aymeric était-il hérétique? Aucun indice ne permet de le soutenir. Autant qu'il est possible d'imaginer la psychologie d'un grand seigneur de ce temps-là, on le devine tolérant pour ces nouvelles manifestations religieuses, se réclamant d'un christianisme authentique, qui pouvaient apparaître bien secondaires à ce guerrier.

Son épouse est incontestablement hérétique.

 Pour Michel Roquebert, elle est parfaitement représentative de la plus ancienne génération de parfaites nommément connues, du Lauragais aux Corbières, parmi lesquelles elle figure, sous le nom de « la dame de Roquefort » avec Guillelme de Tonneins, grand-mère de Roger de Mirepoix et de son cousin, Raymond de Pereilha, les défenseurs de Montségur.

Pierre des Vaux de Cernay, dans l'Historia Albigensis, la traite de pessima heretica. Ce terme d'hérétique est synonyme, dans le langage du temps, de parfait. Ce qualificatif de détestable parfaite donne ainsi la mesure de sa foi et de son rayonnement: elle n'hésite pas à s'enfermer dans le château de Termes, assiégé par Simon de Montfort, avec son fils Guillaume. Elle meurt sans doute au cours du siège ou de l'incendie du château qui suivit.

La mesure de sa foi hérétique est donnée par cette constatation : sur ses huit enfants, mis à part l'aîné, qui sera évêque catholique de Carcassonne (peut-être faut-il voir là un signe d'une conversion tardive de sa mère à l'hérésie?), les sept autres enfants seront tous hérétiques notoires : trois parfaits et une parfaite, un chef de guerre farouche opposant aux Français et à l'Église, un père de deux parfaites, une mère de deux chevaliers notoirement cathares...

 

                                       LA BATAILLE  DE MONTGEY                                  

Les frères cadets de l'évêque (nous n'évoquerons pas celui-ci) sont donc parfaits. Le plus connu est Arnaud-Raymond, seigneur de Durfort, très jeune parfait ; à l'arrivée des Croisés, « il revient au siècle » comme le déclare à l'Inquisition son neveu Guillaume de Corneille. Mais il continue d'accueillir des hérétiques, logeant fréquemment le médecin-parfait, Guillaume-Bernard d'Airoux (constamment présent dans la Montagne Noire, à Montgey, à Puylaurens où il soigne toute la noblesse).

En 1236, mentionné comme hérétique revêtu dans les dépositions, donc redevenu parfait, poursuivi, il se cache dans les taillis de Montgey, avant de se réfugier à Montségur où il choisira, en mars 1244, le bûcher plutôt que l'abjuration.

Ses deux frères, Bec et Augier, également parfaits, font peu parler d'eux. Ils vivent entre Durfort et Roquefort, où ils tiennent « maisons », lieux de prédication avec table ouverte pour les parfaits de passage ou les simples croyants.

Le cinquième fils d'Aymeric, Guillaume, est, comme sa mère, voué aux gémonies par Pierre des Vaux de Cernay qui le décrit comme un guerrier fanatique: il assassine en 1209, près de Carcassonne, l'abbé d'Eaunes qui venait de rencontrer le légat du Pape à Saint Gilles ; on le retrouve à la défense du château de Termes d'où il parviendra à s'échapper avant la reddition, puis à la défense des murs de Toulouse, où il trouvera la mort, lors du siège de Toulouse par Simon de Montfort en 1211.

Le sixième garçon, Guiraud, est un simple croyant, mais père de deux parfaites.

Des deux filles de Guillaume, l'une, Roumenge, est parfaite et tient « maison » à Puylaurens, fréquentée par toute la bonne société du pays.

La dernière, Bérengère, épouse du sire de Corneille, châtelain de Las Touzeilles (Palleville), aura deux fils, Pierre et Guillaume, également compromis dans l'hérésie, comme les deux fils de Guillaume, Arnaud et Isarn.

Profondément hérétique aussi la belle famille de Guillaume de Roquefort: son épouse Marquèse Isarn, de Fanjeaux, était la fille d'une parfaite (tardivement convertie par saint Dominique) et la sœur de Pierre Isarn, l'évêque cathare du Carcassès.

Depuis l'âge de raison, déclarera-t­elle aux inquisiteurs, elle avait été croyante, instruite avec son fils Jourdain par Gaillard de Festes. Redoutable instructeur que ce seigneur hérétique : Marquèse nous le décrit, pour une escorte de parfaits, « portant épée, pourpoint et chapeau de fer ».

Jourdain, premier seigneur déclaré de Montgey, naît ainsi dans une famille qui couvre tout l'éventail religieux du temps, entre un oncle évêque catholique et un autre hérétique ! Entre une mère fervente croyante (dans sa jeunesse, elle se convertira ensuite...) et un père qui a mis son épée au service de l'hérésie et de ses suzerains méridionaux, Jourdain ne pouvait être qu'un personnage complexe.

Guerrier comme son père aux côtés du comte de Foix, puis sans doute dans toutes les batailles qui suivirent la bataille de Montgey, à laquelle il attacha son nom : seule victoire complète des Languedociens contre les « Français », évoquée jusqu'à Rome, au concile de Latran, en 1215 !

Par la suite, et avec le reflux des « Français », son engagement est constant aux côtés des hérétiques, selon le témoignage de Guillaume Pierre, habitant de Nogaret (la commune limitrophe de Montgey) : Jourdain entretient des parfaits, va écouter leurs prédications dans les maisons familiales de ses oncles à Durfort ou à Roquefort.

 Il se fait soigner comme son épouse Beatrix par le médecin-parfait Guillaume-Bernard d'Airoux, ou deux parfaites, sans doute ses cousines, les dames d'Aragon.

 Il réunit la noblesse du pays à Roquefort, officiellement pour une raison administrative (pour cause de « châtellenie »), en fait pour écouter un parfait très connu, Guillaume Vital, qu'il ira, encore, entendre chez sa mère à Fanjeaux.

Sous des prétextes de chasse avec « ses hommes », il va écouter dans les bois autour de Montgey la prédication des bonshommes.

Jourdain, cependant, n'a pas (influence de son oncle l'évêque ?) rompu les ponts avec l'Eglise romaine. Il coopère. Il fait des dons à l'abbaye de Saint-Papoul, il assiste l'abbé de Soréze dans une opération de police à Roquefort. Il est vrai qu'ils sont sans doute cousins, comme avec l'inquisiteur Bernard de Roquefort, massacré à Avignonnet... Aucune trace, en ce qui le concerne d'une condamnation, ou même d'une convocation devant les inquisiteurs.

A la différence de son épouse, Beatrix, qui est totalement hérétique. Devant le tribunal de l'Inquisition, au cloître de Saint Sernin, elle refuse d'abjurer et se voit condamnée, en 1243, à la prison perpétuelle «pour avoir écouté et cru les parfaits et les avoir hébergés ».

Hérétiques encore ses enfants, écoutant eux-mêmes les prêches devenus tout à fait clandestins dans la seconde moitié du siècle. Hérétiques encore les épouses d'Aymeric l'aîné, et de Jourdain le cadet: elles habillent, nourrissent les parfaits fugitifs, vont les écouter dans les caves ou dans les bois.

 Au temps du reflux complet de l'hérésie dont l'organisation ne subsiste qu'en Lombardie, les deux belles-soeurs songent « à abandonner leurs maris » pour rejoindre les parfaits à Sirmione, au bord du lac de Garde (mais ne vont pas au-delà de cette intention...).

Peu après, vers 1273, à l'époque où il ne reste théoriquement plus de parfaits dans le Toulousain, Jourdain II est hérétiqué en grande pompe, au moment de sa mort, par quatre parfaits et en présence d'une pléiade de gentilshommes du pays. Nous n'avons aucune autre trace d'une telle manifestation à cette époque.

 Il semblerait que ce dernier Roquefort du siècle ait tenu avec quelque panache à proclamer sa foi au moment même où l'hérésie s'effaçait.

Les cousins de Jourdain II, les fils de Berengère de Roquefort, Pierre et Guillaume de Corneille, sont tous deux compromis dans l'hérésie. Avant la croisade, ils fréquentent, en bande amicale, le Lauragais de Saint-Paul­ Cap-de-Joux, à Lanta, à Montréal.

 Au moment où la Croisade déferle sur le pays, Pierre est en garnison, près de son oncle Guillaume, à Roquefort, où il accueille ou escorte des parfaits. Prudents les deux frères se retirent à l'abbaye de Soréze où, avec la qualité de moines, ils vont passer une dizaine d'années, entre 1210 et 1220. Un témoin de Soréze qui raconte l'épisode, Pierre Peytavi le Vieux, rend évident le fait qu'ils étaient néanmoins restés hérétiques.

  

Michel Roquebert les juge peu courageux (encore ne connaissait-il pas cet épisode!). Effectivement, lors qu'ils sont entendus par l'Inquisition en 1243, ils reconnaissent quelques manifestations hérétiques dans leur jeunesse, mais nient toute participation active ultérieure. Pourtant divers témoignages nous les révèlent agents très actifs de l'hérésie : ils nourrissent des parfaits, les hébergent parfois, escortent leur cousin Jourdain, assistent souvent à des prédications avec la société du pays dans les bois des environs, jouent même un rôle de banquiers changeurs.

Après 1250, Guillaume est hérétiqué lui aussi de manière solennelle par quatre parfaits dans sa maison de Las Touzeilles « au moment de la maladie dont il mourut ». Curieusement (est-ce en raison de leur passé de moines?), ils ne seront pas poursuivis à la différence de leur cousine.

Nous ne savons rien de la descendance de Pierre. Par contre, Guillaume qui avait épousé une Bernarde de Camis en premières noces, en avait eu deux enfants, Isarn et Arnaud.

Ils sont eux aussi instruits dans l'hérésie. Ils étaient suffisamment fanatisés : ils insistaient si fortement pour que leur oncle, Pierre de Dreuilhe (qui avait eu des pratiques, mais sans doute pas une foi très profonde...) rencontre des Parfaits et « fasse ce qu'il fallait pour son âme », que Pierre de Dreuilhe préféra prendre l'habit monacal et se retirer à Soréze !

La famille seigneuriale, sur les quatre générations qui se sont succédées pendant plus, d'un siècle est donc liée à l'hérésie, mais sans couper tous liens avec l'Eglise romaine.

Les familles nobles de moindre importance, la classe des chevaliers, le sont également. Mentionnons pour Montgey, le chevalier Raimond Aiffre, «croyant dès l'âge de raison », devenu parfait, puis abjurant ; le chevalier Arnaud qui accompagne Jourdain lors des parties de chasse, en fait des réunions hérétiques clandestines dans les bois ; le chevalier Guilabert de Roussilles, tardivement converti à l'hérésie au moment où « faidit » il se réfugie à Montgey ; les damoiseaux Raimond de Gandels, N'Assaut de Vauré, leurs épouses et celles de cinq chevaliers de Vauré qui ne sont pas nommés.

Citons ensuite des familles entières : les de Camis, alliés aux Roquefort, comme on l'a vu; la famille de Saint-Michel, de petite noblesse, mais titulaire d'un fief à Las Touzeilles. Elle mérite une mention toute particulière : c'est, en dehors des Roquefort, la famille la plus hérétique du secteur.

Grazida, la mère, est citée par de nombreux témoins. Elle est constamment préoccupée d'aider les parfaits « sans lesquels il n'y aura pas de salut», les nourrissant, les habillant, organisant réseaux et relais, infatigable jusqu'à ce que la pince de l'Inquisition se referme peu à peu sur toute la famille à partir de 1257.

  

La famille de Dreuilhe, alliée des Roquefort, vivant entre Durfort et Soréze, est aussi liée à l'hérésie, participe activement à ses manifestations, du moins dans la première moitié du siècle.

La noblesse locale, dans la mesure où elle a pu être recensée, a bien été à peu près entièrement hérétique, comme dans le Lauragais, la Cabardès, les Corbières.

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Le deuxiEme cercle

 

Parmi les hérétiques recensés, nous trouvons des familiers du château. D'abord les principaux collaborateurs : les quatre régisseurs, les « bayles » de Jourdain de Roquefort: (1 à Montgey, 2 pour Vauré, 1 à Soréze) assistent à ses côtés à toutes les grandes manifestations extérieures, l'escortent, hébergent des parfaits lorsqu'il est devenu dangereux de les recevoir au château, remettent leur nourriture quotidienne à d'autres « hommes » qui reçoivent les parfaits « sur ordre de Messire Jourdain », déclarent-ils aux inquisiteurs.

Certains, tel Guillaume Guibert, participent aussi aux missions de confiance près du diacre Engilbert à Lanta, assurent dans les temps difficiles des relais, convoient les parfaits par des chemins détournés, puis les confient à un autre homme de confiance, Gautier Sicard, un tailleur qui habite dans l'enceinte du château.

Les serviteurs des familles nobles, soit des Saint-Michel, soit des Corneille, seules familles en dehors des Roquefort, à paraître disposer d'une domesticité, sont aussi des collaborateurs constants: ils portent aux parfaits, dans leurs cachettes, nourriture, vêtements ou messages.

Autour du château, les témoignages révèlent d'autres « croyants »: un autre tailleur, trois tisserands, un meunier.

On trouve à Garrevaques un autre meunier hérétique convaincu. Mais les autres meuniers de Montgey, au moins cinq, compte tenu du nombre de moulins, ne sont pas nommés.

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Le troisiEme groupe : les croyants de base

 

Comme le montrera le tableau ci-dessous, les professions déclarées ou mises en évidence dans les procès-verbaux d'interrogatoires, en dehors des bayles et des domestiques, sont très peu nombreuses : laboureur, tailleur, forgeron, arbalétrier, clerc, tisserand surtout.

Le fait n'a rien d'anormal dans une société rurale. La majeure partie des déclarants appartient à la catégorie des anonymes sociaux (professions non déclarées).

Michel Roquebert, analysant la population de Mas-Saintes-Puelles, estime qu'elle doit être classée dans la catégorie des paysans. Ici nous recensons trois laboureurs déclarés et 95 anonymes sociaux, soit 68 % de la population hérétique d'origine rurale, pourcentage qui paraît normal pour ce type de communauté médiévale.

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Les parfaits

 

Nous avons considéré comme une catégorie socio-professionnelle à part, celle des parfaits. Théoriquement, surtout au début de leur activité en milieu libre, avant la Croisade, ils exerçaient une profession. A Montgey, nous n'avons recensé que deux cas : un médecin et un tisserand.

Après la Croisade, les parfaits ne paraissent vivre que d'aumônes, de dons monétaires (importants au moment du consolamentum), de la nourriture des fidèles qui fournissent aussi des vêtements. On en recense vingt-quatre pour l'ensemble de la seigneurie (13 hommes, 11 femmes) originaires de Montgey ou y résidant, sans tenir compte de la vingtaine de prédicateurs ambulants effectuant constamment des tournées, clandestines bien entendu. Mais ils représentent 13 % de la population hérétique, proportion importante.

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Essai d'approche chiffrEe de la population hErEtique

 

Nos chiffres ont été obtenus par le dépouillement systématique des procès-verbaux d'interrogatoires soit des habitants de Montgey, soit des localités voisines, tirés des registres des inquisiteurs traduits par Jean Duverney, sans qui ce travail n'eût pas été possible. Nous avons pu ainsi, en recoupant souvent les témoignages, créer 184 fiches de « cathares » habitants de la seigneurie.

 Il ne s'agit que d'approximations, puisque de nombreux registres ont disparu. Mais, sous cette réserve, les renseignements obtenus sont instructifs. Ils sont détaillés par localité de la seigneurie et par catégories professionnelles.

  

La population hérétique

Montgey, 65 ;- Roquefort 70; - Garrevaques, 7; - Las Touzeilles, 20 ;- Vauré, 21 ;- Cahuzac, 184

 

Répartition socio-professionnelle

Nobles 39 (21,19 %) ; - Parfaits, 24 (13,04 Tisserands, 6 (3,26 °Io) ; - Domestiques, 6 (3,26 %) ; - Bayles (régisseurs), 4 (2,17 %) ; - Meuniers, 2 (1,09 %), - Laboureurs, 3 (1,63 %) ; - Tailleurs, 2 (1,09 %) ; - Forgeron, 1 (0,54 %) ; -Arbalétriers, 2 (1,09 %) ; - Clerc 1, (0,54 %); - Anonymes sociaux, 95 (51,63 %); - Soit un total de 184.

 

Tableau des rapports entre la noblesse, ses f'amiliers, les parfaits et les simples croyants, par localité et par sexe :

 

  

Localités

 

Nobles

                     

Familiers     Croyants

Parfaits

Total

hérétiques

F

H

F

H

F

H

F

Montgey

9

7

8

1

 

 

 

 

 

Roquefort

3

 

1

 

37

20

2

7

70

Garrevaques

 

 

 

 

5

 

2

 

7

Las     Touzeilles ....

10

2

2

1

3

2

 

 

20

Vaure

7

1

2

 

7

4

 

 

21

Cahuzac

 

 

0

1

 

 

 

 

1

Total par catégories

29

      10

13

3

76

29

13

11

184

% par catégories

15,76

5,43

7,16

1,63

35,63

15,76

7,06

5,97

99,97

% regroupés

21,19

8,69

57,06

13,03

99,97

 

 

Les enseignements tirés de ces rapprochements sont, nous l'avons dit, instructifs. A l'évidence, c'est autour des familles nobles que l'on retrouve les hérétiques en nombre.

Les deux pôles de la seigneurie, Montgey et Roquefort, avec 65 et 70 hérétiques regroupent 73,36 % des 184 individus recensés.

D'autre part, le rapprochement des hérétiques nobles et de leurs familiers confirme cette attraction. Cette catégorie regroupe 30 % environ du total de la population hérétique.

A Montgey, paroisse étendue, cette population est presque entièrement regroupée autour du château.

On ne trouve, à travers les témoignages que quatre résidences d'hérétiques, trois sur les limites de la paroisse (Lescure, l'Essart d'en Pelissa, las Bartas), une au centre, dans un bois (la Garrigue).

 La thèse de Michel Roquebert :« le catharisme passa de la famille au sens étroit à la familia', pyramide sociale verticalement hiérarchisée, au sein de laquelle le catharisme est la religion dominante », se trouve ici vérifiée.

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Essai d'approche du nombre d'hErEtiques rapportE à l'ensemble de la population

 

Nous ne disposons pas pour le Moyen Âge de données démographiques précises. Seules des approximations sont possibles. Sans évoquer le détail de leurs travaux, des médiévistes réputés ont admis que la population a crû de l'an 1000 au XIVe siècle, temps d'effondrement démographique (refroidissement climatique, guerre de Cent ans, grande peste).

 Après une forte poussée, la démographie aurait été à peu près constante du XVIIe au XIXe siècle. Pour Philippe Wolff, Emmanuel Leroy-Ladurie, l'abbé Passerat, les populations des XIIIe et XIXe siècles seraient quantitativement très proches.

Un autre élément utile d'approche est constitué par le nombre de feux et le nombre d'habitants par feu. Les auteurs, Philippe Wolff, Emmanuel Leroy-Ladurie, déjà cités, Jean-Louis Biget, Monique Bourrin-Derruan, admettent, à la suite de recherches diverses, un ordre de grandeur de 4 à 6 habitants par feu.

Les deux pistes de recherche permettent d'évaluer de manière concordante, avec les précautions d'usage pour ce type d'approximation, la population de Montgey au XIIIe siècle. C'est pour Montgey même que nous disposons d'éléments de comparaison suffisants ; à un moindre degré pour les localités voisines : Cahuzac, Las Touzeilles-Palleville, Garrevaques. Roquefort à disparu et Vauré a été absorbé au XIVe siècle par la création de Revel.

 

La remarquable étude d'A. Tranier fournit en 1862 (Dictionnaire historique et géographique du Tarn) le nombre d'habitants par commune, par paroisse, par hameau, par maison.

Montgey, aux limites inchangées depuis le Moyen Age, a alors 724 habitants répartis dans 124 immeubles, soit une moyenne de 4,4 habitants par feu, chiffre rentrant dans les moyennes admises pour le XIIIe Siècle.

Une seconde approche est fournie par l'étude des censives payées au seigneur de Montgey. Le nombre de contribuables s'élève au XVIIe siècle à 286, dont 279 résidaient à Montgey.

 En admettant que tous les contribuables ne soient pas à la tête d'une famille, et en ne retenant, de manière arbitraire, que 200 feux familiaux, on retrouve un ordre de grandeur situé entre 800 et 1000 habitants, à raison d'environ 4 habitants par feu.

Nous pouvons donc admettre une population de Montgey au XIIIe siècle de l'ordre de 600 (hypothèse très basse) à 1000 habitants (hypothèse vraisemblable), le chiffre de 800 paraissant une approche raisonnable.

 A partir de ces chiffres, il est intéressant de déterminer la proportion (approximative bien sûr!) d'hérétiques recensés à Montgey :

- pour 600 habitants : 10,83 %   pour 800: 8,12 % - pour 1.000: 6,5 %

Ces proportions apparaissent, quelle que soit l'hypothèse retenue, de faibles à très faibles. Elle ne pourraient être relevées que si le nombre d'habitants au XIIIe siècle était inférieur aux estimations raisonnables retenues.

Pour les autres localités tarnaises de la seigneurie, grâce encore à Tranier, mais sans le repère des censives du XVIIe siècle, la proportion d'hérétiques par rapport à la population pourrait être de cet ordre :

 

 

- Garrevaques : pour 515 habitants (1,35 %)

- Las Touzeilles-Palleville : pour 372 (5,37 %)

- Cahuzac : pour 210 (0,45 %).

 

Si nous essayons d'évaluer la population de la seigneurie tout entière, avec la prudence nécessaire, rapportée au nombre d'hérétiques, nous aboutissons aux estimations suivantes :

-pour 1 500 habitants (12,26 %)

- pour 2 000 (9,00 %)

- pour 3 000 (6,13 %)

SOMMAIRE

 

Approche comparEe de quelques catEgories sociales de Montgey avec les donnEes (limitEes) fournies par d'autres localitEs

 

Faute de monographies analogues dans les détails de l'analyse, nous nous bornerons à des comparaisons sommaires :

- La noblesse : elle représente à Montgey : 21,29 % de la population hérétique. Selon Jean Duvernoy (in La religion des cathares), cette proportion atteindrait 25 % des déposants pour l'ensemble du Lauragais. Mais elle représente à Montgey, comme dans le Lauragais, pratiquement la totalité de la classe sociale.

- Les femmes: leur proportion parmi les hérétiques de Montgey représente, toutes catégories sociales confondues, pour l'ensemble de la seigneurie, 28,79 % et 25 % de la catégorie sociale de la noblesse.

Ces constatations infirment les conclusions récentes de la thèse de Julien Roché (« Une Église cathare : l'évêché du Carcassès »): « les femmes cathares issues de la noblesse sont sensiblement plus nombreuses que les hommes à rejoindre l'hérésie. Il semble qu'il s'agisse d'un phénomène plus général de sur représentation de la femme noble dans l'Église cathare. » Il est vrai qu'il analyse le début du XIIIe siècle, alors que notre étude en couvre les deux tiers.

Anne Brenon refuse le débat quantitatif: à ses yeux seule l'analyse qualitative rend compte de l'influence considérable des femmes. Aussi ne trouve-t-on aucun chiffrage dans son ouvrage «Les femmes cathares» (1992).

SOMMAIRE

 

Les parfaits et parfaites

 

Ils représentent à Montgey 24 individus, soit 13,03 % de la population hérétique, ce qui est très important pour la réussite de leur ministère. A titre de comparaison, nous n'avons la trace que d'un seul prêtre catholique pendant la période considérée : le recteur Aymonis, pour une population au minimum de l'ordre de 500 à 600 catholiques...

Curieusement, Michel Roquebert a relevé à Mas Saintes-Puelles seulement 9 % de perfecti et perfectae, alors que la population hérétique était de l'ordre de 400 à 500 individus.

 

Jean Duvernoy a recensé entre 1190 et 1250, pour le Lauragais, 1015 bonshommes, 342 bonnes femmes, soit une proportion masculine de 75 % et féminine de 25 %.

A Montgey, la proportion des femmes est beaucoup plus importante que pour l'ensemble du Lauragais : parfaits (54 %); - parfaites (46 %) (pourcentages calculés en fonction de la population hérétique).

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La proportion d'hErEtiques comparEe à celle d'autres localitEs

 

Rappelons que, à Montgey, en fonction des hypothèses de population retenues, le pourcentage d'hérétiques se situe dans une fourchette entre 7 et 12 %.

Jean-Louis Biget a relevé dans les trois seules monographies publiées à ce jour, les proportions suivantes rapportées à l'ensemble de la population :

- Saint Martin La Lande : de 17 à 22 %

- Mas Saintes Puelles : 25 %

- Serviès-Guitalens : 12 %

 

Montgey se situerait ainsi dans la meilleure hypothèse, celle d'une population globale faible, dans la catégorie la moins élevée.

On mesure à ces constatations, l'exagération manifeste de l'enthousiaste René Nelli situant la proportion d'hérétiques par rapport à la population globale du Lauragais, entre 30 et 40 %!

Résumons les conclusions de cette première partie : la population proprement hérétique paraît bien inférieure aux estimations superficielles ; la noblesse et ses familiers y occupent une place prépondérante ; les femmes paraissent moins nombreuses qu'ailleurs à suivre l'enseignement des parfaits.

Après cette tentative, qui était indispensable, d'évaluation de la population hérétique, nous essaierons d'examiner d'aussi près que possible, comment les croyants vivaient leur foi, dans cette période de persécution.

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Les manifestations de l'hErEsie

 

Nous nous pencherons tour à tour sur les parfaits, les lieux de culte, les manifestations cultuelles, les différentes pratiques au sein même de la seigneurie, après avoir rappelé rapidement quelques données essentielles concernant l'Eglise cathare.

L'Église cathare est uniquement composée de parfaits, parfaites qui ont reçu le sacrement essentiel du baptême, le consolamentum ou « consolation », équivalant pour eux à une ordination.

Les malades peuvent solliciter le consolamentum seul moyen d'échapper à la damnation éternelle, à condition qu'ils soient à l'article de la mort, pour éviter tout retour au péché. De ceux qui ont guéri et qui n'ont pas eu la force de respecter strictement les règles d'abstinence et de continence imposées aux parfaits, on dit « qu'ils sont retournés au siècle ».

 

 

Le simple croyant ou sympathisant n'est rattaché à l'Église que par le «melioramentum », sorte de prière adressée au parfait par laquelle on sollicite sa bénédiction. Dans les interrogatoires intéressant Montgey, il n'est jamais question de melioramentum, mais d' « adoration ».

 Le fidèle effectue trois génuflexions, incline la tête et demande la bénédiction du parfait, en disant bénédicité, ou se limite à une seule génuflexion ou inclinaison de la tête avec la formule des trois bénédicité ; après quoi le parfait répond « Dieu vous bénisse » et donne le baiser de paix, entre personnes d'un même sexe.

L'Église, il vaudrait mieux écrire les Églises, au nombre de deux à l'origine (France et Albi) passent vers la fin du XIIe siècle à quatre : Toulouse, Agen, Carcassonne, Lombardie.

A la tête de chacune un évêque, assisté d'un Fils majeur et d'un Fils mineur. Les évêchés sont subdivisés en diaconats, avec un diacre à sa tête. Celui-ci constitue le seul élément de hiérarchie apparent dans une communauté du type de la seigneurie de Montgey.

 Montgey dépend du diaconat du Vielmurois, vaste circonscription allant de l'Agout à la Montagne Noire en passant par le Lauragais, dans l'évêché de Toulouse.

Voilà dans quel cadre rituel et géographique s'est inscrite la pratique de l'hérésie à Montgey.

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Les parfaits et parfaites à Montgey et las Touzeilles

 

Nous avons vu au chapitre précédent que l'encadrement religieux était relativement important, supérieur à la moyenne lauragaise, semble-t-il. A l'évidence, il ne s'agit pas d'un nombre constant, mais des parfaits recensés sur un demi-siècle environ.

Les parfaits résidant à Montgey sont au nombre de 6: parmi eux un chevalier (Raimond Aiffre), Pierre Arnaud (tisserand), Guillaume Guibert, laboureur.

 Les trois autres, Bonnet, Guillaume, Bernard appartiennent à une même famille d'Auvezines. Les parfaites sont au nombre de 5: la veuve de Guillaume Carradier, Rixende de Vuciassac et Ermengarde Melona. Ces dernières vivent dans une cabane, elles y hébergent un infirme, et sont très visitées.

 Deux autres sont sœurs, filles apparemment de Guiraud de Roquefort: Ermengarde de Berlande et Rixende de Vielmur: elles ne sont citées qu'une fois.

Trois parfaits originaires de Montgey sont itinérants: Ermengaud d'Auvezines, brûlé à Montségur, Guillaume Aribert et Guillaume Carrière. Le cas de ce dernier est significatif des difficultés de recrutement de parfaits de qualité: simple bouvier que l'on devine, dans l'interrogatoire publié par Jean Duvernoy, sans beaucoup de caractère ; entraîné à Montségur, il y est ordonné vers 1243 par l'évêque, le dernier évêque, Bertrand Marty.

Il va errer pendant dix ans avec divers compagnons jusqu'à sa capture dans la Montagne Noire, après quoi il abjurera.

Dix-neuf parfaits, dont trois femmes, passeront à Montgey. Rappelons que les parfaits devaient toujours être accompagnés par un socius, dont le nom n'est pas toujours fourni. Parmi les trois parfaites, deux sont de bonne noblesse (Alazaïs et Effiante d'Aragon) reçues au château vers 1228. Parmi les visiteurs masculins notables Bertrand Marty, alors Fils mineur, puis majeur avant de devenir évêque, des diacres, Arnaud Hue (Vielmurois), Guillaume Vitalis et Bernard Engilbert. Raymond Gros, qui se réfugiera à Montségur, le médecin-parfait Guillaume-Bernard d'Airoux (on compte au moins 6 visites), Raymond de Bouville, et Guillaume Vitalis, l'un des prédicateurs les plus appréciés (Jourdain de Roquefort l'a choisi pour la grande manifestation à Roquefort déjà citée plus haut).

 Une mention particulière pour Arnaud-Raymond de Roquefort, alors fugitif, qui au lieu de se réfugier au château, reste dans un bois, au pied de la colline, à la Garrigue.

Curieusement, en dehors de Raymond de Bouville, nous ne retrouvons pas les mêmes intervenants à Las Touzeilles, localité très proche de Montgey, foyer hérétique notable autour des familles de Saint-Michel et de Corneille : nous avons recensé, Bouville non compris, 10 intervenants non rencontrés à Montgey, parmi lesquels une personnalité très importante dans la seconde moitié du siècle, Guillaume Prunel, originaire de Saint-Paul Cap de Joux, qui effectue de constantes liaisons avec la Lombardie. Aucune trace de parfaite itinérante à Las Touzeilles.

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Les parfaits et parfaites à Roquefort

 

Le castrum de Roquefort constitue un cas particulier. Sur 8 parfaits nés dans le castrum, 3 appartiennent à la noblesse (Arnaud-Raymond, Bec et Augier de Roquefort), 5 d'origine populaire sont en même temps itinérants : Pierre Boutier et son socius Villemanhan sont, comme Pons Grimaud, des habitués de Montgey.

 Guillaume Rafard, d'une famille entièrement vouée à l'hérésie, ira jusqu'en Lombardie avant, à son dernier retour, d'être fait prisonnier et d'abjurer. Un seul, Pierre Arimandi, paraît n'avoir jamais quitté Roquefort, Bec et Augier de Roquefort se retrouvant à Durfort (où ils ont également une maison) et à Soréze.

Le cas des parfaites est plus notable. Au nombre d'une dizaine, toutes de classe populaire, elles paraissent très implantées. Trois ou quatre vivent chez Pierre Bourrel et le servent. Trois autres qui vivent tantôt chez les uns, tantôt chez les autres ne sont pas autrement désignées que las Rogieras.

 Raymonde Autier et les deux sœurs, Alamande et Beldona (dite encore de Verdun) vivent le plus souvent chez Raymond Rafard. Elles seront très actives entre 1230 et 1250: leur réputation est telle que l'abbé de Soréze essaie vainement de les faire arrêter en 1233. Deux d'entre elles, Raymonde et Beldona seront finalement prises par le curé de Verdun et brûlées à Castelnaudary en 1258.

Enfin, dernier indice de l'importance du foyer hérétique à Roquefort, on n'y dénombre pas moins de 21 parfaits de passage, tous nommés, sauf un appelé l'hérétique boiteux. Parmi eux quelques personnages reviennent fréquemment, Bernard Tilhol (inconnu à Montgey et Las Touzeilles), socius de Guillaume Prunel en 1275, le diacre Guillaume Vitalis dont nous avons déjà signalé l'importance à Montgey, et Guillaume Prunel, le plus souvent cité dans la seconde moitié du siècle.

Les visites semblent obéir à une relative périodicité : 1228, deux visites ; 1233, deux visites. Il faut attendre 10 ans, en 1248, pour retrouver deux visites. Elles s'espacent ensuite, signe manifeste des difficultés de l'Église cathare qui n'existe plus qu'en Lombardie: deux visites de Guillaume Prunel en 1263 et, 12 ans après, en 1275, la dernière.

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Les lieux de culte

 

Avant la Croisade, ce sont les « maisons » ou de parfaits ou de parfaites, comme Roumenge de Roquefort à Puylaurens. Selon Berbéguère de Loubens, sa maison est fréquentée par toute la bonne société du pays. Il ne semble pas qu'elle ait perduré après la Croisade.

Aucune maison n'a été signalée à Montgey. Guiraud de Roquefort paraît en avoir tenu une à Vauré, avec ses deux filles parfaites signalées plus haut.

A Roquefort, les trois autres frères de Roquefort, Arnaud­Raimond, Bec, Augier, tous parfaits, y ont tenu maison ainsi qu'à Durfort et Soréze même. On retrouve la trace de Bec et d'Augier, tenant toujours maison où sont traités les hérétiques et prodiguées les prédications, jusqu'en 1220, à Durfort.

Les témoignages confirment que, avant la Croisade, ces maisons sont très fréquentées et les prêches publics.

 

 

Après la Croisade, les seules maisons dont il soit fait encore état sont celles d'Augier et Bec de Roquefort, leur frère Arnaud-Raimond étant «retourné au siècle », après avoir été déclaré en 1217 « faidit »(noble dépossédé de ses biens pour sa participation à la lutte contre la Croisade).

Les réunions se tiennent alors dans des maisons amies, telle celle de Raimond Rafard à Roquefort qui recevra la grande réunion organisée par Jourdain de Roquefort pour «cause de châtellenie», en fait pour écouter Guillaume Vitalis. Nous avons souligné le fait plus haut : Montgey ne paraissait pas sûr.

En effet, après 1230 et les débuts de l'Inquisition, les parfaits sont rentrés dans la clandestinité.

Si Bernard Engilbert réside avec trois autres parfaits au château de Lanta, chez les Hunaud, puissante famille du Lauragais, totalement hérétique, où il reçoit Jourdain de Roquefort, le même Engilbert en visite à Montgey se cache dans la cave de Sicard, le tailleur, avec son socius, Raimond Gros ; Ermengaud d'Auvezines se cache dans le foin sur l'aire de Berbéguère de Loubens, à Vauré.

A Las Touzeilles, le lieu de cache favori, et de rencontre, est le bois de Pierre de Corneille. Mais pendant près de 20 ans Grazida de Saint-Michel accueillera des parfaits chez elle ou chez sa fille Aladaïs et son gendre Jean de Brugairol.

Entre 1235 et 1238, trois fois, des réunions seront organisées dans les bois de la Sauzière à Lempaut, en 1236, dans le bois des Angles à Vauré et encore à trois autres occasions ; en 1238, à Montgey dans les bois de La Garrigue, dans la combe de Las Bartas, puis dans la cabane de Lescure, chez ces deux parfaites où l'on retrouve deux chevaliers, Guillaume de Corneille et Guilabert de Roussilles et un notaire de Lavaur, Pierre de Lugan. Arnaud-Raymond de Roquefort, pourtant l'oncle du seigneur Jourdain se cache dans les taillis de La Garrigue, où l'on retrouve aussi Guillaume Carrière et Bonnet d'Auvezines : originaires de Montgey, ils ne sont pas accueillis dans leur famille...

Nous retrouverons le même Carrière et Guillaume Aribert en 1253, peu avant leur arrestation, cachés dans un jardin près du village de Montgey.

A peu près à la même époque, c'est le bois de «La Mignonne» à Verdun qui accueille les fugitifs, tandis que d'autres sont hébergés à Montgey au Mas des Alamans, ceux-ci étant arrêtés peu après.

En 1258, Guillaume Prunel et Bonnet d'Auvezines font un bref séjour chez le gendre de Grazida de Saint-Michel, Jean de Bugairol, mais en 1263, ils changent chaque jour de résidence à Roquefort, Durfort, Palleville.

En 1266, Raymond Vital se cache à Roumens au lieu dit « la Condamine », puis au mas de « Cosels ». En 1272, Guillaume Rafard, revenu de Lombardie, n'ose pas se montrer à Roquefort: il se cache dans un bois « Le Batut », puis nuitamment de cave en cave chez son frère ou Pierre Arimand à Roquefort, après une vaine tentative dans la grange de Petrone Bru, à Durfort.

 De 1272 à 1274, même à Roquefort, pourtant le lieu du pays où le catharisme a été le plus fervent, les parfaits ne se montrent plus: Guillaume Prunel et Bernard Tilhol sont nourris « dans les genêts » près de Durfort par Petrone Bru ; en 1274, on ne les rencontre plus que cachés plus haut « dans la montagne », avant d'être peu à peu arrêtés. Il n'y a plus ensuite de trace de passage de parfaits.

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Les manifestations religieuses

 

Elles sont limitées à l'extrême, décrites sur questions des inquisiteurs : les parfaits sont l'objet de leur curiosité constante et des marques de reconnaissance qui ont pu leur être données.

Les règles imposées sont simples : ne pas jurer, ne pas mentir ; avant chaque plat dire : bénédicité ; manger si possible le pain béni par les parfaits et avec eux ; assister aux prêches, les aider en fournissant vêtements, nourriture, aumônes, les cacher s'il le faut.

Les inquisiteurs se préoccupent essentiellement de savoir si le témoin ou les personnages cités ont adoré les parfaits selon, à peu de choses près, la règle simplifiée citée in limine : trois flexions de genoux en disant chaque fois bénédicité.

 L'hérétication, le consolamentum se déroule de la manière suivante: une exhortation préliminaire à se donner aux parfaits, «hommes bons et sains qui procurent le salut et sans qui personne ne peut être sauvé». Ensuite, l'assistance récite le pater noster. Selon le cas, il est demandé au mourant d'abandonner femme ou mari, à la femme ou au mari de l'abandonner à Dieu, à l'Évangile et aux bonshommes.

Il est recommandé de prévoir à l'occasion de la cérémonie un don, parfois très important, pour l'Église. Suit la réception de la paix: les hommes se baisent trois fois la bouche entre eux et avec les parfaits ; les femmes reçoivent l'Évangile sur l'épaule, puis se baisent deux fois, entre elles, la bouche en travers, comme les hommes.

L'invocation au Saint Esprit est courante et les pratiques superstitieuses ne sont pas exclues : un tisserand de Montgey, Pierre Arnaud, porte une cordelette sous les seins. Il invoque le Saint Esprit avec de telles clameurs que son frère, avant l'hérétication, lui demande de se taire (Registre de Parnac, 463).

Nous avons, grâce à la déposition de Guillaume de Corneille, la description de deux enterrements en 1206, à Saint Paul, en 1209 à Puylaurens : les morts sont portés au cimetière cathare (il ne semble pas que d'autres cimetières soient évoqués ailleurs), accompagnés par la population, chandelle en main.

Notons pour clore cette analyse, comment Guillaume Rafard a été instruit par les parfaites qui vivaient chez son père: « Mon frère et moi avons maintes fois mangé avec les parfaites et du pain béni par elles. Elles nous apprirent à dire le « Pater Noster » et comment, avant de prendre de la nourriture, dire toujours : « Bénissez ». »

 

 

Le même Rafard, en 1274, avant d'être arrêté, alors qu'il est caché dans le grenier de son frère, reçoit la visite d'un parent éloigné qu'il veut convertir et décrit sa tentative :

« Pons Faure, de Lamothe, m'apporta des noix, des pommes, des poires. Il m'adora trois fois, les genoux fléchis, ainsi que je le lui appris. Il n'avait jamais vu un bonhomme jusque là. Et il entendit ma prédication jusqu'à la nuit. Il retourna chez lui, de nuit. » Curiosité satisfaite, le cousin ne revint jamais le voir...

Ces deux extraits de témoignages sont intéressants à un double titre. La simplicité des rites favorise l'éducation religieuse, aussi bien de l'enfant que de l'adulte. A tout prendre, l'éducation religieuse de Guillaume Rafard enfant ne se différenciait pas de celle qu'il aurait reçue dans une famille catholique.

Plus intéressant encore est le récit de la tentative de conversion. Il est significatif que, dans une région où l'on voudrait souvent voir le catharisme triomphant, un paysan de Lamothe, près de Puylaurens, ville où l'hérésie avait été solidement implantée, n'ait jamais rencontré de parfait, dans la seconde moitié du siècle. A l'évidence le Catharisme avait cessé de se développer.

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Observations sur les pratiques trEs cloisonnEes de l'hErEsie
     aprEs les dEbuts de l'Inquisition

 

A Roquefort, la pratique est presque clanique. Cinq familles : les Arland (7), les Arimandi (8), les Mercadier (10), les Rafard (6), représentent à elles seules près de la moitié de la population hérétique. A Las Touzeilles, la proportion est du même ordre : deux familles seulement, les Corneille (6), les Saint-Michel (8), toutes deux d'origine noble, représentent la moitié des cathares recensés.

A Montgey, la famille seigneuriale et la partie de la famille de Corneille qui vit à Montgey mises à part, les familles hérétiques sont de faible importance : 3 frères à Auvezines ; pères et fils deux fois ; couples deux fois. la pratique paraît être plus individuelle et surtout masculine, hors noblesse: 49 hommes, 4 femmes seulement.

Le dépouillement des dépositions permet de constater la pratique très locale, très cloisonnée de l'hérésie, après la Croisade et, bien sûr, les débuts de l'Inquisition.

Avant la Croisade, les jeunes nobles sont constamment en voyage : les cadets Roquefort ou leurs cousins Corneille chevauchent constamment entre Montgey, Puylaurens, Saint Paul, Lanta, Caraman, Montréal ou Laurac. Il n'en est plus question ensuite, sauf des déplacements de Jourdain vers Soréze, Roquefort ou Lanta.

A l'intérieur de la seigneurie, on note des relations fréquentes, ce qui paraît normal entre les localités de la plaine (Montgey, Garrevaques, Las Touzeilles, Vauré). Elles paraissent très limitées avec Roquefort : particularisme ? circulation plus difficile dans la Montagne ? Nous esquissons ci-dessous une tentative de réponse.

 

 

Autre fait notable, dans la plaine lauragaise, les relations entre hérétiques, hors seigneurie, semblent, curieusement, inexistantes.

Puylaurens, Blan, Lamothe mises à part, les localités voisines ne sont jamais citées dans les dépositions des habitants de Montgey ou Montgey dans celles des déposants extérieurs à Montgey. A titre d'exemple, dans les dépositions de deux habitants de Saint Julia, relevées par Jean Duvernoy, Saint Julia étant limitrophe de Montgey, aucun nom de Montgey n'est cité, alors que, dénoncés, ils ont tout intérêt à aider les inquisiteurs.

Un habitant du Faget (Pons Carbonnel) évoque des prêches à Caraman et à Auriac, avec de nombreux participants : aucun, en dépit du voisinage, n'est de Montgey.

 Dans les dépositions recueillies de juillet à décembre 1245 à Nogaret, autre localité limitrophe, plus de 30 noms sont donnés. Un seul concerne Montgey : Jourdain de Roquefort. Mais le témoin, il est vrai, habitait peu avant Roquefort... Aucun témoin de Puylaurens, et ils sont nombreux, à l'exception de Berbéguère de Loubens déjà nommée, ne fait allusion à Montgey.

Pas davantage d'allusion à Montgey dans les dépositions d'habitants de Caraman, de Saint Félix, des Cassés, de Bernard de Scopont, seigneur du lieu...

Autre constatation du même ordre : si, après la chute de Montségur les relations de Roquefort avec la Lombardie sont fréquemment évoquées, plus rarement à Las Touzeilles, ailleurs, notamment à Montgey, il n'en est jamais question.

Roquefort entretient, d'ailleurs, des relations nombreuses, au contraire de Montgey, avec toutes les localités voisines de la montagne, au-delà des possessions des Roquefort, soit Saissac, Labécède, Villepinte, avec de fréquents mariages exogamiques dont on ne trouve aucune trace à Montgey.

Peut-on en conclure que la pratique de l'hérésie est restée longtemps plus libre, plus active dans la montagne que dans la plaine lauragaise ? Les relations y apparaissent plus prudentes au sein de communautés, où, à l'évidence, tout le monde se connaît, mais où l'on préfère ne pas susciter la curiosité des voisins, tandis que la pince de l'Inquisition se referme lentement, mais efficacement sur le pays, la plaine d'abord, plus tard la montagne.

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L'Inquisition

 

Elle fut établie à Toulouse à l'automne 1229 par le cardinal de Saint Ange, légat du pape Grégoire IX, promulguée au cours d'un concile réunissant archevêques, prélats, abbés des monastères, en présence du comte de Toulouse Raymond VII, du sénéchal de Carcassonne, des comtes et barons du pays. Les dispositions prises à cette occasion assuraient toute liberté à l'Église pour extirper l'hérésie, condamnée dès 1199 par Rome: une inquisitio était ordonnée contre toute personne soupçonnée d'hérésie qui ne pourrait être condamnée qu'après avoir été jugée par une personne d'Église ayant qualité: ce seront les inquisiteurs.

Il n'est pas inutile de souligner que la saisie des biens des hérétiques et de leurs défenseurs étai à la même époque promulguée par un statut de Raymond VII, les bien saisis revenant à l'autorité comtale...

Mentionnons encore, pour laver l'institution des critiques sommaire habituelles, que l'Inquisition constitua, sur un plan proprement procédural, un progrès considérable pour l'instruction - lente et patiente - des dossiers.

 Les papes successifs, notamment Innocent IV, ont minutieusement défini les règles des interrogatoires : l'inquisiteur devait s'adjoindre deux assesseurs pour l'examen des prévenus, dont les dépositions devaient être consignées par écrit et par un notaire public, et ne prononcer la sentence qu'après s'être entouré des conseils de jurisconsultes prudents.

La modération était recommandée : la condamnation ne pouvait être promulguée qu'à la suite d'un aveu formel ou de preuves claires et catégoriques.

Précisons encore que les prévenus devaient être cités pour comparaître, qu'il était prévu un temps de grâce et un retard dans le prononcé de la sentence pour amener les prévenus à se convertir, les condamnés devant bénéficier, dans leur prison, de cellules individuelles, de droits de sorties et de visites, du moins en théorie. Mais le fait est que l'on s'évadait aisément du «Mur» (la prison) et que nous avons, ici ou là, des récits d'entretiens avec les prisonniers.

Il nous a paru utile, au travers de la trentaine de dépositions utilisées (mais qui n'intéressent pas toutes des habitants de Montgey), de relever les questions posées : elles permettaient aux inquisiteurs d'apprécier le niveau d'hérésie de leurs interlocuteurs. Nous avons ensuite analysé les dépositions des habitants de la seigneurie, avant de nous pencher sur les condamnations connues. On le constatera, la main de l'Inquisition n'a finalement pas été très lourde à Montgey.

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Les questions

 

Elles n'ont rien d'original à Montgey. Elles sont quasiment identiques dans tous les interrogatoires, processus mis au point par les inquisiteurs.

 L'essentiel était de connaître les liens existant, ou ayant existé avec les parfaits. Il est notoire que, le système une fois connu, les parfaits recommandaient à certains fidèles d'avouer des pratiques vénielles pour n'être condamnés que très légèrement. En recoupant les témoignages, parfois sur un demi-siècle, on prend la mesure de ces aveux limités ou des mensonges évidents des déposants. Du moins est-il utile de procéder à un recensement des questions posées quasiment à chaque témoin. Les réponses, ou ambiguës ou nettement mensongères, amenaient les inquisiteurs à confronter les témoignages, à différer leurs conclusions pour laisser au témoin le temps de la réflexion ou trouver le chemin de la repentance.

La succession des questions permet de mesurer le degré des fautes, des plus légères aux plus importantes : rencontres avec les parfaits (vision), l'adoration (génuflexion avec demandes de bénédictions), repas avec les parfaits et le pain béni par eux, les dons, l'appareillement (confession publique), l'hérétication (sacrement essentiel: soit l'ordination des parfaits, soit l'équivalent de l'extrême-onction catholique).

Les questions recensées suivent naturellement l'ordre des fautes présumées :

- avez-vous vu les parfaits ?

- avez-vous écouté leur prédication ? - les avez-vous crus ? - les avez-vous adorés ?

- avez-vous fléchi les genoux en disant: « bénissez » - une fois? - deux fois ? - trois fois ?

- les parfaits vous ont-ils donné la paix en disant « Dieu vous bénisse » ?

- avez-vous assisté à un appareillement ?

- avez-vous reçu la paix en baisant les parfaits deux fois sur la bouche en travers ? Après quoi chacun a-t-il baisé les autres en travers de la bouche ?

-(s'il s'agit d'une femme) avez-vous reçu le Livre (Évangile de Jean) sur l'épaule? et vous êtes-vous baisées entre femmes ?

- avez-vous mangé avec les parfaits ?

- avez-vous dit avant chaque plat: « bénissez »? - avez-vous mangé du pain béni par les parfaits ? - que savez-vous des vaudois ?

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Les interrogatoires

 

Dès 1230, l'Inquisition a été confiée aux Frères prêcheurs, créés par saint Dominique pour lutter contre l'hérésie avec les mêmes armes qui faisaient la force des parfaits : la prédication et la pauvreté.

 A peu près 50 inquisiteurs ont été actifs, pendant le demi-siècle qui nous intéresse (1230­1280), précision apportée que la dernière manifestation inquisitoriale intéressant Montgey s'est déroulée en janvier 1282. Entre temps 13 inquisiteurs au moins se sont intéressés à Montgey à diverses dates.

Première enquête à Montgey par Frère Ferrier (très actif en Lauragais : plus de 5.000 interrogatoires!) le 26 août 1243: Marquesa de Pauligne, mère de Jourdain de Roquefort ; le 14 novembre, Raimond Aiffre, chevalier, ancien parfait, revenu à la foi catholique et ayant, déclare-t-il, converti par amour une parfaite (seule intervention de ce dieu païen dans toutes les déclarations dépouillées...) ; le 14 novembre et le 15 décembre, Guillaume et Pierre de Corneille, les cousins de Jourdain de Roquefort, temporairement moines à Soréze, nous l'avons raconté, et notoirement hérétiques : aucune trace de condamnation, leurs aveux étant édulcorés ; le 17 décembre, Berbéguère de Loubens, grande dame du Puylaurentais, qui a des terres à Vauré, dans la seigneurie de Montgey, très liée à Beatrix de Roquefort : elle reconnaît quelques mauvaises mais très anciennes fréquentations.

Aucune trace de condamnation. Il est significatif, confirmant nos constatations précédentes sur le rôle de la noblesse, de relever que sur 6 interrogatoires, 5 concernent les familles nobles, mais sans condamnation connue. Le cas du sixième, Pons Boutier, un laboureur, est bien différent, comme celui de son frère Arnaud, dont la déposition ne nous est pas parvenue. Ils furent tous deux condamnés à la prison perpétuelle, le second par contumace (il avait sans doute jugé prudent de disparaître...).

Pons avait reconnu seulement avoir assisté à des prêches et à un appareillement (tout en affirmant le contraire ensuite...). On peut s'étonner de sa condamnation: très coopératif, il avait donné les noms de 23 participants, parmi lesquels 6 nobles, dont Pierre de Corneille, 3 bayles (régisseurs) de Jourdain, 3 femmes et un clerc (seule présence signalée d'un religieux catholique assistant à un prêche). Sur cette liste très importante, nous ne connaissons qu'un interrogé : Pierre de Corneille. Il serait surprenant que les inquisiteurs se soient désintéressés des autres. Mais nous n'avons aucune trace de l'exécution des peines pour l'un ou l'autre des frères Boutier : fuite définitive, rachat de la peine ?

De cette première démarche de l'Inquisition, retenons ceci: ce sont essentiellement des nobles qui sont interrogés, mais sans condamnation connue (hormis Beatrix de Roquefort dont nous reparlerons), comme s'il s'agissait d'un avertissement à la classe dirigeante, alors que deux laboureurs, pas plus coupables en apparence que Raimond Aiffre, ou les frères de Corneille, sont lourdement condamnés.

Frère Ferrier entend ensuite, le 22 décembre 1243, Guillaume Guibert, homme de confiance de Jourdain: il reconnaît des gestes d'adoration, niés ensuite, des missions de confiance auprès des parfaits, l'hébergement de parfaits pour le compte de Jourdain, l'assistance à des prêches... Il réitère là des aveux antérieurs à d'autres inquisiteurs qui s'étaient donc déjà intéressés à Montgey, et les renouvellera cinq ans plus tard. Aucune trace de condamnation.

Il n'en est pas de même de l'autre déposant du même jour, le 22 décembre : Pierre Grimaud, également «homme de Jourdain ». Il reconnaît pratiquement les mêmes faits que Guillaume Guibert qu'il accompagne souvent, avec les frères de Corneille ou les frères Boutier, déjà nommés, assistance aux prêches, hébergement de parfaits et parfaites, « sur ordre de son maître et contraint ». Il fut à nouveau convoqué, devant d'autres inquisiteurs, Bernard de Caux et Jean de Saint Pierre le 16 octobre 1247, et abjura. Peine perdue : le 27 octobre, il est condamné à la prison perpétuelle. Son cas est révélateur de la lenteur de la procédure inquisitoriale : 3 audiences en 4 ans, toujours sur citation de l'intéressé. Laissé en liberté, il s'abstint de venir entendre sa condamnation et se constituer prisonnier. Quatrième audience et nouveau jugement en mars 1248, le déclarant contumax, ce qui entraînait confiscation de ses biens.

Le cas de Pierre Grimaud le confirme : il est difficile de soutenir que la justice inquisitoriale était expéditive. Précisons encore ici qu'elle ne torturait pas, (la torture n'ayant été utilisée que par le sénéchal Eustache de Beauharnais,) et n'envoyait personne au bûcher. Lorsqu'au terme des longues procédures un condamné était déclaré hérétique, il était alors livré au bras séculier, autrement dit l'autorité comtale, puis royale, qui en disposait en confisquant ses biens et en l'envoyant éventuellement au bûcher...

Nous ne retrouvons des interrogatoires que les 8 et 25 juin 1254: Guillaume Carrière, ce bouvier devenu parfait, dont Jean Duvernoy a publié la longue déposition, abjurait et échappait apparemment à toute condamnation.

Les interrogatoires ne reprennent que quelques vingt ans plus tard, en novembre 1273. Guilabert de Saint-Michel, l'un des fils de Grazida, vraie chef de ce clan entièrement hérétique, comparaît devant Frère Ranulphe, «préalablement emprisonné» (l'Inquisition était devenue prudente !) puis encore une fois devant le même en décembre 1273, enfin, deux ans après, le 23 novembre 1275 devant un autre inquisiteur, Pons de Parnac, condamnation éventuelle inconnue...

Encore trois ans et les comparutions reprennent. Comparaissent successivement les deux frères, fils de Guillaume de Corneille, (interrogé 35 ans plus tôt !), Isarn le 28 mars, « préalablement arrêté », et Arnaud venu sur citation. Ils font à Frère Bernard de l'Isle, remplaçant l'inquisiteur en titre, Frère Pierre Arsieu, des déclarations laconiques.

 Le premier se borne à invoquer une rencontre dans un bois de son père de deux parfaits convoyés par l'inévitable Grazida de Saint-Michel et un autre de ses fils, Sicard, alors qu'il était enfant, près de 40 ans auparavant... Le second affirme avoir déjà fait des aveux à un autre inquisiteur, Guillaume Bernard de Dax (nous n'avons pas d'autre exemple de son intervention à Montgey à une date indéterminée) qui lui donna une pénitence et n'avoir rien su depuis de l'hérésie...

Rappelons cependant que les deux frères avaient été des prosélytes très actifs, vers la moitié du siècle, comme le révèle l'épisode déjà cité de l'entrée au monastère de Soréze de Pierre de Dreuilhe, leur oncle, pour y mourir en paix et échapper à leurs démarches constantes afin qu'il « sauvât son âme » en recevant des parfaits ! Il est vrai que cet épisode n'a été connu que par une déposition de Pierre Peytavi-le-vieux, dont la dernière audition date de 1279...

Exceptionnellement, au mois de juin 1278, le tribunal inquisitorial se déplace à Montgey et siège dans la demeure du chapelain Pierre Aymonis. Pierre Géraud (ou Guiraud) comparaît « spontanément» devant Frère Arsieu, l'inquisiteur en titre, avec pour témoins, le curé Aymonis, Frère Bernard de l'Isle et le notaire public qui reçoit la déposition, Ath de Saint Victor. Soulignons l'intervention du curé de Montgey qui a manifestement aménagé cette audience foraine du Tribunal : il l'héberge et agit comme témoin. Mentionnons encore ici qu'il a dû passer au moins 30 ans comme curé de Montgey, ce qui lui permettait de bien connaître ses paroissiens. Une des dépositions fait apparaître le curé de Vauré également comme témoin, pour un de ses paroissiens.

Cette comparution si bien aménagée permet à Pierre Guiraud d'obtenir l'assurance qu'il évitera l'emprisonnement, la perte de ses biens, la pénitence publique. Sa grâce obtenue, il prête serment, affirme avoir déjà déposé devant d'autres inquisiteurs (Frères Pelhisson et Amie]) qui l'ont condamné à porter des croix (sur ses vêtements) et des pèlerinages qu'il a accomplis. Il revient sur cette déposition antérieure, incomplète, en partie par oubli, en partie par peur (ces déclarations successives sont toujours justifiées par ces deux mêmes motifs). Il révèle quelques faits très précis, concernant notamment Guillaume de Corneille, décédé depuis une vingtaine d'années, d'autres, vieux de 30 à 40 ans, donc sans grandes conséquences. Mais il fait ainsi, aux yeux de l'Inquisition, preuve de sa bonne foi.

Le dernier habitant de la seigneurie à être interrogé est Guillaume Rafard, souvent évoqué à propos de Roquefort. Ancien parfait, ayant erré misérablement, en dissimulant sa qualité au cours des dernières années, arrêté le 7 août 1278 au lieu dit « Latrape » (nom prédestiné !), il constitue une prise de choix. Il est interrogé une première fois par les Frères Hugo Amiel et Jean Galand, dès le 15 août 1278, et deux fois encore au cours des 4 années suivantes, son dernier interrogatoire datant du 26 janvier 1282. Le premier procès-verbal comporte son acte d'abjuration et sa conversion à la foi catholique: « détestant toute secte d'hérétiques se dressant contre la foi catholique et la sainte Église romaine, quel qu'en soit le nom, il promet et jure sur les saints Évangiles de Dieu touchés de sa main que désormais il gardera fidèlement et observera la foi catholique que la sainte Eglise prêche et observe et qu'il ne s'en séparera jamais... » Sa longue confession allant de 1233 à août 1278 fournit une des sources les plus détaillées d'information sur la pratique d'abord au grand jour de l'hérésie, puis de ses extrêmes difficultés à survivre, en tentant de maintenir des liaisons avec la Lombardie où perdura encore quelques années l'évêché de Toulouse. L'Inquisition, en un demi-siècle, avait réussi sa mission.

 SOMMAIRE

 

Les condamnations

 

Au hasard du récit, nous avons déjà évoqué quelques condamnations. Il est intéressant d'en compléter le tableau pour parvenir à une analyse synthétique. Rappelons cependant que les sources incomplètes ne permettent ici encore qu'une évaluation approximative. Nous avons rencontré des interrogatoires qui auraient dû entraîner des poursuites, des interrogatoires suivis de poursuites, des poursuites sans connaître les dépositions qui les ont précédées, sans doute après dénonciation.

Sur les 184 hérétiques recensés et poursuivis, nous rencontrons d'abord des abjurations non suivies de condamnation :

- en 1245: Bernard de San Quirico et Guillaume Gaubert, au cloître de Saint Sernin devant Frère Arnaud, prieur de Saint Sernin, apparemment tous deux laboureurs.

- en 1248: le chevalier Raimond Aiffre, à Toulouse, sans doute à Saint Sernin devant les inquisiteurs Bernard de Caux et Jean de Saint Pierre. - en 1278: Pierre Géraud, à Montgey, devant Frère Arsieu - enfin, Guillaume Rafard, le 15 août 1278.

 

 

 

Des condamnations légères ont été prononcées à des dates imprécises mais sans doute postérieures à 1250, compte tenu du contexte des dépositions : Raimond Tessier à porter des croix ; Pierre Géraud également, mais avec l'obligation d'accomplir des pèlerinages non désignés (généralement le Puy, Saint-Gilles, Sainte-Foy de Conques, Saint-Jacques de Compostelle). Pierre Teysserre a été croisé pour hérésie, condamnation qui aurait impliqué, normalement, la participation à une croisade, mais avec possibilité de rachat, Arnaud de Corneille à des « pénitences ».

Michel Roquebert a relevé également des condamnations ayant frappé des Roquefort, prononcées par l'inquisiteur Pierre Seillan en 1241: Guillelme de Roquefort à faire les pèlerinages du Puy et de Saint-Gilles (pour avoir « vu » des hérétique, leur avoir donné à coudre une chemise et des chaussures, en échange d'un bol de froment ..) et Géraude de Roquefort à de plus longs pèlerinages : le Puy, Saint-Gilles, Saint-Denis, Saint-Thomas de Cantorbéry.

 Il est vrai que ses fautes étaient plus lourdes : elle avait reçu plusieurs fois des vaudois (alors que tous les autres déposants ont constamment déclaré tout ignorer des vaudois), leur avoir fait des dons, avait cru que c'étaient des bons hommes, et cru qu'on ne devait ni jurer ni tuer. (Nous rendons compte de ces deux condamnations, parce qu'elles sont citées par Michel Roquebert, mais sans qu'il nous soit possible de les intégrer dans la généalogie des Roquefort mise au point après Michel Roquebert et Jean Duvernoy, de telle sorte qu'elles ne sont pas recensées dans notre fichier hérétique.)

Suivent les condamnations les plus importantes prononcées par l'Inquisition: la prison perpétuelle, qui peut être suivie, en cas de contumace, par la confiscation des biens, et, éventuellement, la remise au bras séculier pour le bûcher (aucun cas de cet ordre n'étant relevé à Montgey, il convient de le préciser).

Les condamnations à la prison perpétuelle débutent, de manière spectaculaire, avec la condamnation de Beatrix de Roquefort le 29 mars 1247. Nous avons déjà souligné combien cette condamnation de la grande dame du pays paraissait étrange, alors que son mari, Jourdain, était un coupable beaucoup plus évident. Les motifs de sa condamnation ont déjà été analysés: elle a reçu et cru des parfaits, elle a refusé d'abjurer. Nous ignorons si elle a exécuté sa condamnation, ou si elle a été rachetée, ce qui paraît plus probable. On garde cette impression, à la voir seule de sa classe, poursuivie et condamnée, qu'elle a été une victime propitiatoire.

Ont suivi les condamnations de petites gens, habituelles en quelque sorte: les frères Boutier, et Pierre Grimaud déjà évoquées en mars et décembre 1248; Arnaud Doais, sans doute cultivateur, le 3 juin 1248; Pierre Guillaume Textor fils, le 14 du même mois. À Las Touzeilles, on relève trois condamnations des membres de cette famille éminemment hérétique, les Saint-Michel : le père Pierre (prison perpétuelle, août 1244), deux de ses fils, Raimond et Pierre à la prison perpétuelle le 16 août 1248. Leur mère, Grazida, a été arrêtée en 1257, mais nous ignorons son sort ultérieur.

 

Pour être complets, encore qu'il ne s'agisse pas de condamnations de l'Inquisition, n'oublions pas le tribut versé particulièrement par les habitants de Roquefort au bûcher ; les deux sœurs Autier brûlées à Castelnaudary, Arnaud-Raimond de Roquefort, brûlé à Montségur le 16 mars 1244, comme l'autre parfait, Bernard d'Auvezines, originaire de Montgey. Insistons sur ce point: le bûcher de Montségur a été peuplé de volontaires, ceux qui ont refusé d'abjurer. Le cas de ces deux parfaits, l'un de vieille noblesse, l'autre issu du peuple méritait d'être signalé. D'autres rencontrés au cours de notre enquête, Aiffre, Carrière, Rafard ont, au contraire, choisi l'abjuration, hommes de moindre foi...

Au total donc, sur 184 hérétiques recensés, 22 ressortissants de la seigneurie ont été effectivement poursuivis, soit environ 12 %, les condamnations effectives ne frappant à des degrés divers qu'un peu plus de 7 % des hérétiques.

Nous retenons de cet examen que les peines les plus lourdes sont antérieures à 1250, que, le cas de Beatrix de Roquefort mis à part, elles ont surtout frappé le menu peuple. Il est, d'autre part, significatif qu'Yves Dossat (in Les crises de l'Inquisition toulousaine au XIIIe siècle, 1233­1273) n'ait recensé sur le Registre des Encours (relevé des biens confisqués), comme le montre le tableau (voir document 4) qu'il a dressé des confiscations intervenues dans le Lauragais aucune mesure concernant Montgey.

 

 

 

Source

Localités

Prison

Mort

Fuite

Hérétiques

Relaps

J 326 n° 6

Lanta

7

 

3

1

 

 

Mas-Sainte-Puelles

2

 

 

1

 

 

Laurac

3

 

 

 

 

 

Saint-Félix

3

 

 

 

 

J 326 n° 7

Saint-Julia

2

 

 

 

 

 

Vaure

7

 

 

 

 

 

Montmaur

6

 

 

 

 

 

Airoux

4

1

 

 

 

 

Les Casses

10

 

1

 

 

 

Saint-Paulet

3

 

 

 

 

 

La Pomarède

6

 

 

 

 

 

Dreuilhe

10

2

1

 

 

 

Roumens

9

4

3

 

 

 

Montégut

 

 

1

 

 

 

Toutens

6

 

 

 

 

J 326 n°8

Caraman et dépend.

35

5

3

2

 

 

Auriac

7

 

 

 

 

 

Bonneville

Loubens 1

1

 

 

 

 

J 324b n° 37 3°

partie Le Vaux

7

2

3

 

 

 

Montgaillard

2

 

 

 

 

 

Montferrand

7

1

 

 

1

 

Avignonet

16

 

 

 

2

 

Saint-Martin-1-Lande

Labécède 1

13

 

6

1

2

 

Mas-Saintes-Puelles

3

 

 

1

 

 

Mascarville

Loubens

2

6

 

 

 

 

 

Caraman

4

1

 

 

 

 

 

Ainsi Montgey, lieu de la plus importante bataille contre les croisés de Montfort, siège d'une seigneurie entièrement vouée à l'hérésie au début du XIIIème siècle, a-t-il vu s'effondrer et disparaître à peu près entièrement en un demi-siècle d'Inquisition cette foi nouvelle qui se voulait un retour au christianisme primitif et qui, en définitive, a été un facteur essentiel d'approfondissement de la doctrine catholique et de renouvellement de ses méthodes d'évangélisation.

Née, admise, maintenue longtemps dans la classe dirigeante, n'entraînant (Roquefort mis à part) qu'une adhésion limitée des classes populaires, efficacement combattue à compter du milieu du XIIIe siècle par le clergé local, soutenu par les proches abbayes et les méthodes de l'Inquisition.

Liée sans doute aussi à une tardive prise de conscience quasi nationale de l'occitanité (que l'on nous pardonne le néologisme !), l'hérésie cathare, moment de l'histoire languedocienne, ne pouvait survivre à la disparition de ce comté de Toulouse libéral et dépassé par la marche du temps.

 

Pierre BOUYSSOU

Mainteneur des Jeux Floraux

SOMMAIRE

 

SOURCES

 

Michel ROQUEBERT :

"les Seigneurs de Montgey au XIIIe siècle". RdT n°88, 1977. "L'épopée Cathare, I198-1212",  Privat, 1970.

"L'histoire des Cathares", Perrin, 1999.

"Saint Dominique ", Perrin, 2003.

"Simon de Montfort", Perrin, 2005.

"Les Cathares", Perrin, 1998.

Divers articles des Cahiers de Fanjeaux et de la revue Hérésis. 

Jean DUVERNOY :

"Registre de Ferriey" (Doat XXI, XXII, XXIII). "Registre de Parnac" (Doat XXVI).

"La religion des Cathares", Privat, 1976.

"Le dossier de Montségur", Périgrinateur, 1998.

Julien ROCHE :

"L'évêché de Carcassès", l'Hydre, 2006.

Anne BRENON :

"Les femmes Cathares", Perrin, 1992.

GUERIN et MAISONNEUVE :

 "Histoire Albigeoise", Vrin, 1951. DON VAISSETE : HGL, TV VI, VII, VIII, Privat, 1872-1904.
      DUMEGE :

"Histoire générale de Languedoc", Paya, 1842. Philippe WOLF: "Histoire du Languedoc", Privat, 1967.

A. TRANIER :

"Dictionnaire historique et géographique du Tarn", Tranier fils, 1862.

René NELLI :

"La vie quotidienne des Cathares en Languedoc au XIIIe siècle", Hachette, 1969.

Jean-Louis BIGET :

"Réfiexions sur l'Hérésie dans le Midi de la France au Moyen-âge", Hérésis n°36-37.

"Le pays Cathare", Le Seuil, 2000.

Monique BOURIN-DERRUAN :

"Villages médiévaux en Bas-Languedoc", l'Harmattan, 1987.

 

 

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